Un flic en taule !

Introduction

Bonjour à vous, lecteur et/ou simplement curieux par mon parcours de vie. Seulement 33 années de ma vie vécues et encore de longues années devant moi, je l’espère.

33 années qui ont déjà suffi à remplir ces quelques chapitres à cette 1ère autobiographie relatant mon parcours de vie à travers le récit de mes nombreuses expériences de vie qui font de moi la personne aujourd’hui.

La personne qui est ENFIN capable, d’exprimer et partager mon petit bout de chemin si…. atypique.

Bonne lecture…

Note : les différents faits relatés font partie de ma vraie histoire. Pour des raisons de respect de la protection de la vie privée, les identités des différentes personnes sont fictives.

Chapitre 1 : L’électrochoc.

Je me réveille allongé sur un lit d’hôpital. Cet endroit m’est totalement inconnu. Quel jour et quelle heure sommes-nous ? Mon visage me fait souffrir et je ne parviens plus à voir de l’oeil droit. Ai-je eu un accident de voiture ? Je ne m’en souviens pas.

Je remarque des tâches de sang séchées sur les draps blancs de mon lit.

Je souffre d’une migraine atroce. Sûrement due à la consommation excessive de rhum coca à la soirée d’hier. Je parcours mon visage à l’aide de mes mains en espérant n’avoir aucune blessure. Ma mâchoire et mon nez sont intacts. Arrivé sur le haut du visage, je ressens de vives douleurs au niveau de mes arcades sourcilières. Je palpe des plaies récentes sur la tempe gauche. Mon œil droit est si tuméfié et gonflé que je ne suis plus capable de l’ouvrir. Mais que s’est-il passé bordel ?! Où est ma femme Fauve et mon cousin Marcus, avec qui j’ai passé la soirée hier ?

Pas un seul bruit dans cette grande chambre d’hôpital commune. Il n’y a personne et il fait trop calme. Je décide de me lever et de trouver un membre du personnel soignant. OUF, je tiens debout sans aucune autre douleur. Je porte les mêmes vêtements qu’hier soir à cette soirée ; à savoir un jean noir, un t-shirt noir, qui est aujourd’hui maculé de sang séché. Je constate qu’il est arraché sur la partie supérieure droite au niveau de l’épaule. Mes chaussures classiques noires en daim sont au pied du lit. Je les enfile et emporte avec moi le chariot à roulettes où est suspendu une perfusion dont je ne connais même pas son contenu. Je recherche en vain à proximité de mon lit mes effets personnels, tels que ma veste, mon gsm et mon porte cartes. Je commence à marcher vers l’extrémité de la grande chambre. Waouh, je titube en ressentant encore les effets de la consommation des nombreux rhum de la veille. Merde, j’ai encore abusé avec la boisson ! À quel point ? Ai-je eu un accident ? Ai-je blessé quelqu’un ? J’ai besoin d’en savoir plus.

J’arrive à hauteur d’un couloir et j’entends des voix provenant d’un local où je peux lire sur l’écriteau « Bureau des médecins ». Je frappe timidement à la porte et un infirmier ou un médecin peut-être est assis face à un pc. Je remarque dans son regard son étonnement à me voir conscient et debout face à lui. Perplexe, j’adresse la parole d’une voix anormalement rauque. Bonjour monsieur, désolé de vous déranger mais je ne sais pas où, quand et comment je suis arrivé ici. Il me répond naturellement : Vous avez été transféré cette nuit en ambulance à la suite d’une bagarre vers nos urgences. Nous sommes à l’hôpital de Mont Godinne. Vous avez passé un scan cette nuit qui n’a révélé aucune commotion cérébrale. Vous présentez une plaie ouverte au niveau de l’arcade sourcilière droite qui a été suturée à l’aide d’une colle médicale.

Ma bouche entrouverte, laisse à l’infirmier comprendre mon étonnement et mon incompréhension. Après quelques secondes de réflexion, je lui demande s’il sait où se trouvent mes effets personnels. Il me répond par la négative. Mais où sont mes affaires ? Perdues ? Je demande à utiliser le téléphone du bureau afin de joindre mon épouse Fauve et espérer enfin avoir des éclaircissements quant au déroulement de la soirée sur le thème d’halloween et quand à l’origine de ma présence au sein de cet hôpital qui m’était inconnu jusqu’à ce jour. Toujours utile de connaître par cœur le numéro de téléphone de ses proches. Je compose le numéro de Fauve et les tonalités se succèdent. Réponds s’il te plait, réponds ! Juste avant de tomber sur la messagerie vocale, elle décroche, Ouf ! J’entends qu’elle me répond d’une petite voix fatiguée : Allo… Je rétorque : C’est moi, je suis aux urgences de l’hôpital de Mont Godinne, sais-tu venir me rechercher s’il te plait ? Je t’attendrai dehors, au niveau du parking des urgences. Sa réponse est brève : Oui, je vais démarrer. Et elle raccroche immédiatement.

A-t-elle peu dormi ? Lui est-il arrivé quelque chose ?

Je remercie l’infirmier pour l’appel que j’ai pu passer et lui demande s’il peut me libérer de ma perfusion. Il acquiesce et me demande de retourner vers le lit sur lequel je me suis réveillé déboussolé.

Assis sur le lit, je commence ou plutôt je tente de commencer à assembler les pièces du puzzle pour y voir plus clair. En vain, je n’ai que très peu de souvenir. L’infirmier me rejoint avec le matériel médical nécessaire. En regardant sa montre, je lui demande de me communiquer l’heure. Il me dit qu’il est 07h50 et que nous sommes le 01/11/2023. J’ajoute ces informations temporelles au puzzle en cours.

Une douleur vive et brûlante se fait ressentir lorsqu’il retire l’aiguille de mon bras. Il me place ensuite un pansement et un bandage pour bien serrer le tout.

Après avoir signé une décharge médicale, je remercie et salue l’infirmier pour les différents soins médicaux et l’informe que mon épouse va venir me récupérer. Il me salue à son tour et m’indique le chemin de la sortie. Je marche le long d’un couloir en suivant les écriteaux « sortie ». Je sors de services des urgences et je m’assois sur une petite borne en béton en attendant l’arrivée de Fauve.

Il fait froid, nuageux et je suis toujours en t-shirt.

Je devine qu’elle doit arriver d’ici une trentaine de minutes environ. Ce qui me laisse le temps de réfléchir…

Le 31/10/2023, mon épouse Fauve, mon cousin Marcus et moi, étions tous les 3 conviés à une soirée privée sur le thème d’halloween se déroulant au château d’Assesse dans la province de Namur.

Il est 20h00, nous sommes présents en mon domicile à nous préparer. Un léger grimage faisant penser à une tête de mort, tout vêtu de noir et le tour est joué pour respecter le « dress code » imposé à l’occasion de cette soirée. Après 45 minutes de route, nous arrivons sur les lieux du rendez-vous méconnu jusqu’à ce jour. Nous sommes face à un immense château, mis en valeur par de nombreux luminaires.

Une fois stationné sur le vaste parking privatif, nous entrons par la grande entrée principale. Immédiatement, nous sommes plongé dans l’atmosphère sur le thème d’halloween par les nombreuses fausses toiles d’araignées accrochées au mur et au plafond.

Plusieurs décorations et figurines de monstres plus vraies que nature sont disposées près du guichet d’entrée où nous payons et validons nos entrées VIP, nous laissant profiter de la formule « All Inclusive ». Hâte de profiter des différents buffets froids et chauds qui seront mis à notre disposition tout au long de la soirée. BLA BLA BLA, j’ai surtout hâte de profiter du bar bien fourni en alcool en tout genre. Vive la formule all-in. GRAVE ERREUR…

Je sors de mes pensées lorsque je suis interpellé par un infirmier qui m’informe que le médecin souhaite encore me rencontrer pour me prodiguer des soins médicaux supplémentaires. Qu’a-t-il pu oublier ?

Naïvement, j’acquiesce et je suis l’infirmier. Il m’invite à patienter dans la salle d’attente des services urgentistes. Le médecin ne tardera pas, me signale l’infirmier.

Je m’assois sur l’une des chaises et je suis dévisagé par plusieurs autres personnes aussi présentes en salle d’attente. C’est sans doute parce que j’ai le visage d’un boxeur qui vient de terminer son 3ème round. Bref, je baisse la tête et j’attends le médecin. À ce moment, le bruit de l’ouverture des portes automatiques me font me retourner et j’aperçois Fauve entrer. Elle me voit et se dirige vers moi. Son visage est très fermé exprimant un mécontentement et une fatigue avancée.

Je remarque que sa lèvre supérieure est anormalement gonflée. A-t-elle reçu un coup ?

La porte automatique s’ouvre à nouveau, laisse entrer 4 policiers (4 collègues…) qui se dirigent en notre direction mais est-ce pour nous qu’ils sont venus ?

Il y avait deux inspectrices en tenue d’intervention et deux inspecteurs en tenue de motard.

J’ai juste eu le temps de dire à Fauve que j’étais assis à l’intérieur car un médecin voulait me revoir.

Je ressens de l’inquiétude dans l’attitude de Fauve. Une inquiétude que je partage. Pour quel motif sont-ils là ? Allaient-ils m’apporter des réponses à mes nombreuses questions ?

Comme si c’était écrit sur mon front, l’une des inspectrices m’adresse la parole et me demande si je suis bien monsieur Dumont. Je réponds par l’affirmative et immédiatement, je suis invité à les suivre vers une petite pièce située à deux pas de la salle d’attente des urgences. Comme dans une boîte à sardines, nous sommes 5 personnes debout dans ce minuscule local. Les deux motards baraqués, les deux policières et moi-même.

Sans attendre et d’un ton neutre, l’une des inspectrices regarde sa montre, lève la tête et annonce : Monsieur Dumont, vous êtes à partir de maintenant, soit à 08h39 privé de votre liberté à la demande du Procureur du Roi dans le cadre de coups et blessures volontaires et involontaires survenus au château d’Assesse ce 01/11/2023 vers 01h00 du matin. Tournez-vous, nous allons procéder à votre menottage et vous transférer au commissariat pour effectuer les différents devoirs d’usage.

Hé merde ! Que s’est-il passé et surtout qu’est-ce que j’ai pu faire pour me mettre dans une telle situation ou dirais-je, dans quel merdié ! Instinctivement, je rétorque: Est-ce nécessaire pour la mise des menottes ? L’inspectrice me répond sèchement : Oui, ça l’est.

Secoué et étonné de ma privation de liberté, j’obéis et me retourne doucement en plaçant les mains dans mon dos. D’habitude, c’est moi qui place les menottes aux suspects…

Les menottes me sont placées, l’inspectrice m’attrape par le coude et signale à ses trois collègues : On peut y aller. Elle fixe les collègues masculines motard : Merci messieurs pour le renfort, monsieur Dumont est calme, on n’aura plus besoin de vous. Ces derniers répondent par un léger sourire en coin et un signe de la tête. Nous prenons la direction de la sortie et nous croisons mon épouse qui remarque directement que je suis menotté. Je croise son regard sans le temps de dire un seul mot. J’aperçois dans son regard un mélange de plusieurs émotions de détresse, de colère et d’étonnement.

Elle était anéantie. J’entends la deuxième inspectrice signaler à mon épouse que je vais être transféré au commissariat de la zone de police de Arches. Une Zone de Police que je ne connais pas, tellement éloignée de ma Zone de Police de Charleroi dans laquelle je travaille.

Les autres personnes dans la salle d’attente se sont sûrement dit que le pseudo boxeur a du faire un mauvais 4ème round pour être si bien escorté par les forces de l’ordre.

Je suis placé à l’arrière côté droit du véhicule de police. Une policière s’est placée à l’arrière côté gauche. AIE. Ça fait horriblement mal aux poignets les menottes lorsqu’on est assis et bloqué au fond de ce siège. À ce moment, j’ai une pensée empathique envers tous les suspects à qui j’ai placé les menottes et qui se plaignaient lors des transferts.

Arrivés une vingtaine de minutes plus tard au commissariat, je suis pris en charge par deux autres inspecteurs, un homme et une femme. Tous les deux avaient la vingtaine d’années.

Je sens dans leur regard qu’ils savent que je suis un des leurs et cela les met mal à l’aise tout autant que moi. Le commissariat est vétuste et pas très grand en comparaison à celui de la belle tour bleue de Charleroi.

Arrivés dans le complexe cellulaire, l’inspecteur m’informe que je vais devoir patienter en cellule le temps qu’il puisse prendre connaissance du dossier et préparer mon audition.

Il me dit d’un ton embarrassé, vous connaissez la procédure… Je hoche la tête et d’initiative, je me retourne, j’écarte les jambes et je me penche afin d’être démenotté. Ensuite, je retire mes vêtements un à un pour l’exécution de la fouille avant mise en cellule. J’entre dans la petite cellule vieillotte où se trouve un grand bloc de béton faisant office de lit. Un matelas au revêtement faisant penser à du plastique est déposé sur ce bloc.

Dans le coin de la cellule, se trouve un WC en aluminium bien encastré et fixé au sol. Où est le papier cul ? L’inspecteur m’informe qu’il vient me chercher dans quelques instants tout en refermant la lourde porte métallique. Je m’assois sur le matelas, vêtu de mon jean, mon t-shirt et mes chaussettes. J’observe la cellule, mais mon attention est attirée sur les quatre murs recouverts de différents « arts abstraits » tels que des graffitis, des dessins, des écritures et autres formes d’expression toutes gravées à l’aide d’objet inconnu. Ces expressions décorent d’une certaine manière ce lieu assez glauque. Voici quelques exemples : « Allysson Je t’aime », « Brandon mars 2007 », « D+S = ♥ », et le traditionnel « Nique la police ». J’aurais bien répondu mais je me suis abstenu : Euh non, merci !

Assis et patientant, je palpe à nouveau mon visage tuméfié et m’interroge sur l’origine de ces blessures.

Des blocs de verres font office de fenêtre laissant entrer un peu la clarté du jour mais surtout laisse entrer un courant d’air froid de novembre. Par chance, sous le bloc de béton (mon lit), se trouve un chauffage laissant s’échapper par un grillage une douce chaleur. Les minutes passent et me semblent interminables, alors que ça doit faire maximum 30 minutes que je suis « enfermé ». Une nouvelle fois, je repense aux nombreux suspects que j’ai placés en garde à vue durant ces dernières années et qui, plus d’une fois, tambourinaient de colère contre la porte en métal du cachot car le temps leur semblait interminable. Désolé d’avoir douté de ces expressions de mécontentement. Victime du Karma ou par une poupée vaudou à mon effigie remplie d’aiguilles, c’est désormais à mon tour d’être coincé et enfermé sans aucun contrôle sur mon sort.

Je sursaute et reviens à la réalité lorsque j’entends le bruit puissant et fort de l’ouverture du verrou et de la serrure métallique. La porte s’ouvre et l’inspecteur me demande de le suivre jusqu’à un local d’audition, très peu meublé lui aussi. Je suis invité à prendre place sur une chaise en plastique face au bureau des deux inspecteurs. Vais-je enfin obtenir des informations faisant avancer l’assemblage de mon puzzle ?

C’est une jeune inspectrice qui se trouve au clavier, assistée par l’inspecteur assis à sa droite. Celui-ci semble plus ancien et s’accorde un rôle de mentor avec la jeune recrue. J’ai aussi suivi cette formation de mentorat, le comble…

Il est presque midi et mon estomac ne s’est pas gêné de me le rappeler. Les inspecteurs me proposent un verre d’eau et me demandent si je souhaite obtenir un repas. Transmission de pensées ? Ils ont bien dit le mot « Repas » mais je sais qu’il s’agit d’un jargon signifiant que je mangerai ce qu’ils trouveront : Quatre tartines au fromage me sont données. C’est déjà ça !

Passons aux choses sérieuses. Le collèg…, l’inspecteur me rappelle que je suis privé de liberté à la demande du Procureur du Roi afin d’être entendu sur les faits d’hier soir et qu’à la fin de ce devoir, le Procureur du Roi sera réavisé avec les éléments que j’aurais apportés à mon audition. Monsieur Dumont, on va vous entendre en Salduz catégorie 4 avec privation de liberté. Un avocat m’a été proposé et j’ai refusé ce droit d’assistance. L’inspecteur continue : Monsieur Dumont, vous avez été transféré cette nuit vers l’hôpital de Mont Godinne. Il semblerait d’après plusieurs témoins que vous étiez fortement sous l’influence de la boisson et que vous soyez à l’origine d’une bagarre.

La partie adverse est hospitalisée en ce moment aux soins intensifs dans un autre hôpital. Elle présente de sévères blessures au visage. Il semblerait également que durant cette bagarre, plusieurs personnes ont tenté en vain de s’interposer afin d’y mettre un terme. Votre épouse ayant aussi tenté de vous écarter aurait reçu un coup involontaire de votre part au niveau de son visage. D’après des témoins des faits voulant rester anonymes, vous auriez finalement été écarté dans une autre pièce afin de calmer la situation tendue sur place. Dans cette pièce, vous seriez tombé au sol, vous blessant ainsi au visage. (Et la marmotte, elle me le chocolat dans le papier aluminium !)

Vous étiez inconscient gisant dans votre sang en cause de votre blessure à l’œil. Le service 100 et la police ont été requis sur place. Après l’énoncé des faits qui me sont reprochés, je reste un moment silencieux avant de réponse gêné et embêté que je ne me souviens d’absolument de rien quant aux faits précités. Je leur informe qu’il s’agit d’un black-out total à la suite d’une consommation plus qu’excessive d’alcool. J’ai au moins pu profiter du bar ! Ai-je au moins profité des buffets froids et chauds ?

L’inspecteur acte ma déposition en ce sens tout en tentant à plusieurs reprises de me tirer les vers du nez sur le déroulement de la soirée. J’en suis sincèrement incapable.

J’ai souvent entendu ces excuses lorsque c’est moi qui prenais les déclarations de suspects (je ne me souviens plus, j’avais trop bu, etc.) et aujourd’hui, c’est à mon tour d’exposer cette réelle justification sur ledit « black-out ». L’audition se termine assez vite et l’inspecteur s’absente du bureau afin d’aviser le Procureur du Roi de garde du maigre contenu de ma déclaration. En espérant que le magistrat de garde sera clément.

Une grande anxiété envahit mon corps en repensant à un autre incident passé. Me portera-t-il préjudice aujourd’hui ?

En effet, il y a presque un an jour pour jour, j’ai été impliqué dans une bagarre, oui encore une… À l’époque, le juge d’instruction en charge du dossier, monsieur Divik avait été clément et n’avait pas décerné de mandat d’arrêt à mon encontre. En contre partie, je devais respecter toute une série de mesures alternatives à la détention préventive et ce pour une durée d’un an. Il m’était interdit de consommer des boissons alcoolisées, de commettre d’infraction, de suivre une thérapie psychologique pour la gestion de la colère et de l’impulsivité, etc. En d’autres termes, le juge d’instruction m’a fait le « gros doigt » en m’invitant fermement à me tenir à carreaux, au risque de passer par la case PRISON. L’inspecteur entre dans la pièce me faisant sortie de mes pensées quant aux faits passés.

Le visage neutre et toujours autant professionnel, l’inspecteur jette un regard à sa collègue et ensuite se retourne vers moi. Monsieur Dumont, j’ai avisé monsieur le juge d’instruction Divik des faits et ce dernier ORDONNE votre mise à sa disposition pour un interrogatoire en vue de l’éventuelle délivrance d’un mandat d’arrêt à votre encontre. Je hoche la tête machinalement sans me rendre compte immédiatement de la tournure que viennent de prendre les évènements.

Attendez ! Quoi, c’est monsieur Divik avisé des faits ? Pourquoi n’était-ce pas un traditionnel Procureur du Roi de garde ?!

Il est 13h55, les inspecteurs me replacent au cachot et m’informent que je vais y rester la nuit et que demain matin, je serai présenté devant le juge d’instruction. Une nuit au cachot ?!

L’inspecteur me propose gentiment de l’eau que j’accepte volontiers. Je retire à nouveau mes chaussures et je réintègre la petite pièce lugubre qui sera ma chambre d’hôtel pour cette nuit. L’inspecteur me donne un petit objet rectangulaire que je prends sans trop comprendre de quoi il s’agit. Mes expressions faciales me trahissent et le policier me précise qu’il s’agit d’une couverture. Perplexe, je le remercie quand même.

Il referme aussitôt la porte métallique en me souhaitant bonne chance pour demain. J’aperçois encore la lumière du jour à travers les blocs de verre. Je réalise qu’il est de ce fait encore assez tôt et que je vais DEVOIR rester dans cette chambre d’hôte de longues heures jusqu’à demain matin.

La côte « Google » doit à peine frôler le 0 sur 5 pour cette petite chambre au sein de l’hôtel de police de la Zone de Police des Arches. Je m’allonge sur le matelas et replonge dans mes pensées en tentant de retracer le déroulement de la soirée. Quand et comment la situation a pu dégénérer ? À quel moment Fauve a reçu ce coup perdu au visage ? Est-ce que ma blessure à l’œil va y laisser une cicatrice à vie ? Vais-je recevoir un « souper » ? Tout d’un coup, ma curiosité prend le dessus et je cesse de me poser toutes ces questions. Ai-je bien compris, l’inspecteur m’a dit que l’objet qu’il m’avait donné était une couverture ?

Je tiens ce fameux objet entre les mains et je me rends compte que ça se déplie et qu’il s’agit d’une couverture de survie. 2 mots sur 3 m’inquiètent dans « Couverture de Survie ». Le premier « couverture »: est-ce que cette fine, très fine feuille métallique peut réellement retenir ma chaleur corporelle et me tenir au chaud ?

Le deuxième « Survie » : est-ce que si horrible une nuit passée au trou ? À quel point, pour parler de « survie » ?!

Je commence à me battre avec cette feuille métallique qui est froide tant au touché qu’au visuel.

Je m’enroule tant bien que mal de manière à ne pas laisser s’échapper ma chaleur corporelle. Je ressemble à une momie ! Le policier ayant accès aux caméras de surveillance de la cellule doit être mort de rire en me voyant.

Totalement déboussolé dans le temps, je remarque néanmoins que le soleil s’est couché. Je vais tenter d’en faire de même, tout en observant les différents écrits sur les murs de la cellule. La nuit passe étonnamment assez paisiblement et je suis réveillé par ce bruit si dérangeant de l’ouverture du verrou et de la serrure de la porte en métal.

Deux autres policiers que je n’avais pas encore vu se présentent et m’informent qu’ils vont procéder à mon transfert vers le palais de justice de Namur.

J’acquiesce, heureux de quitter cet endroit. Je demande l’heure qu’il est et on me répond 07h39.

Vous pouvez sortir de la cellule et remettre vos chaussures.

Un des policiers me menotte à l’avant alors que traditionnellement, ça se fait dans le dos. Même procédure que lors de mon premier transfert, je suis placé à l’arrière côté droit accompagné d’un inspecteur assis à ma gauche en surveillance. Le trajet est assez rapide mais je n’arrive pas à me réchauffer de cette nuit passée en cellule.

Nous arrivons au palais de justice de Namur et le policier se stationne sur le petit parking face au corps de garde. L’un des policiers m’aide à sortir du combi et nous entrons dans le bâtiment. Directement, nous tournons à droite dans une pièce où se trouvent 6 petites cellules entièrement assemblées de métal, ressemblant à de vraies cages à poules. Le comble pour un « poulet » d’être dans une cage à poules ! Je suis démenotté et placé dans l’une des minuscules cellules en attendant d’être présenté au juge. La cage est si exiguë qu’en position assise sur la petite planche de bois faisant office de banc, qu’en tendant mes jambes, je touche la porte grillagée devant moi alors que mon dos est collé contre la paroi en métal derrière moi. Mes deux épaules touchent presque les parois latérales. Il est impossible de s’y coucher.

Je patiente quelques instants assis et je remarque à travers le grillage de la porte que la grande fenêtre de la pièce est ouverte, laissant bien sûr entrer un vent froid très désagréable. Je n’étais pas seul dans les cellules. Je peux entendre deux hommes discuter en langue étrangère. Je pense qu’il s’agit de la langue arable mais je n’y comprends rien du tout.

Après 20 minutes, un avocat entre dans la pièce, se dirige vers moi et à travers les barreaux, il se présente comme étant maître Mothe. Il m’explique qu’il a été requis par mon épouse Fauve afin de m’assister durant l’audition devant le juge. Merci Fauve d’avoir pris cette initiative car j’étais tellement déboussolé que je me jetais seul dans la gosse aux lions, sans avoir pensé à me faire assister d’un avocat. La présence de l’avocat et l’attention de mon épouse me « reboost ». Un policier ouvre la cellule, me démenotte et nous montre le chemin vers un petit local où j’ai pu m’entretenir de manière confidentielle avec maître Mothe quant aux faits des coups et blessures qui sont reprochés au « Dumont alcoolisé souffrant d’un black-out » durant cette soirée d’halloween.

L’avocat détend immédiatement l’atmosphère en me signalant que mon maquillage au visage est plus vrai que nature et qu’il est en plein dans le thème d’halloween. Je ris spontanément en repensant à mon visage fortement tuméfié qui me fait d’ailleurs encore souffrir. Maître Mothe reprend un air plus sérieux et m’explique le déroulement de ce qui va suivre. Vous allez être entendu par monsieur le Juge d’instruction Divik. Oh bordel ! Le même juge que j’ai confronté l’année dernière. Il ne va pas me louper ce coup-ci !

Mon avocat relit ma déclaration faite à la police et m’aiguille sur la stratégie à suivre lors de l’interrogatoire qui se déroulera dans quelques minutes. Il ne manque pas de me rappeler qu’une charge supplémentaire sera ajoutée aux différents faits dont je suis suspecté, à savoir le non respect des mesures alternatives qui vous étaient imposées. Grrr, il en avait aussi également eu connaissance de ces fameuses mesures restrictives qui se terminaient dans 14 jours, la poisse !

Notre entretien fut bref et nous nous dirigeons accompagnés de deux inspecteurs vers le bureau de monsieur le juge d’instruction Divik. En entrant dans la pièce, je salue timidement dans un premier temps madame la greffière (galanterie oblige !) et ensuite monsieur le juge assis derrière son bureau, le visage neutre. Je suis convié à m’asseoir sur une chaise face au juge. Les deux policiers demandent au juge si leur présence est nécessaire pour garantir la sécurité durant cet interrogatoire. Monsieur Divik tourne la tête vers moi, me dévisage un court moment et répond aux policiers : ça va bien se passer avec monsieur Dumont, vous pouvez patienter dans le couloir s’il vous plaît.

Nous ne sommes plus que quatre dans le bureau, l’atmosphère change et devient plus tendue. Un silence s’installe avant que monsieur le juge prenne la parole. Il commence l’interrogatoire en demandant de confirmer mon identité et ensuite m’informe des droits que je possède durant ce devoir d’instruction.

Mon attention est attirée par le désordre apparent sur le bureau du juge. En effet, l’entièreté du bureau est rempli de piles de dossiers, toutes plus grosses que les autres. Comment s’y retrouve-t-il avec ces milliers de documents ? Est-ce que j’aurais l’audace de lui proposer mes services en ébénisterie et lui présenter un devis quant à la création et l’installation d’une grande bibliothèque qui prendrait parfaitement place sur le mur se trouvant derrière lui ? Ce n’est peut-être pas une bonne idée.

Monsieur Divik tient entre ses mains ce qui semble être mon dossier. Il parcourt quelques pages avant de me poser différentes questions assez précises pour corroborer ou non ma déclaration faite à la police.

Plusieurs questions sur mon parcours scolaire, professionnel et familial me sont aussi posées.

Monsieur Divik reste de marbre, ne laissant transparaître aucune émotion. Malgré son attitude, je reste confiant et satisfait des réponses que j’ai pu donner au juge face aux multiples questions.

Ce sentiment de confiance est très vite volatilisé lorsque le juge me rappelle les faits de l’ancienne bagarre datant presque d’un an et pour lesquels j’étais encore contrait de respecter les mesures alternatives que lui-même avait décidées et imposées en son temps.

Il clôture l’audition sur un ton plus sérieux encore, voire sévère : Monsieur Dumont, j’ai en ma possession assez d’éléments à votre charge pour vous inculper pour le chef de coups et blessures volontaires à l’encontre du nommé X et pour le chef de coups et blessures involontaires à l’encontre de votre épouse. Par ailleurs, n’ayant pas respecté les mesures alternatives qui vous étaient imposées de respecter à la lettre, vous avez perdu aujourd’hui toute ma confiance. De plus, j’estime qu’il existe un gros risque de récidive et que vous constituez un réel danger pour la société.

Pour ces différents motifs, je délivre ce jour un mandat d’arrêt à votre encontre. De part votre profession principale en tant que policier à Charleroi, je décide de vous placer dans une prison éloignée de votre zone d’habitat et de travail à savoir la prison de Dinant. Vous y serez transféré après avoir signé et reçu une copie de votre interrogatoire ainsi que du mandat d’arrêt.

Anéanti face à cette décision et les propos tenus, je reste immobile un instant et parvient ensuite à acquiescer par un hochement de la tête la « sentence ferme » du juge prise à mon égard.

Je ne réalise pas encore tout à fait ce qu’il se passe…

Les policiers que je n’avais pas entendu revenir dans la pièce m’invitent à les suivre en prenant la direction de la sortie. Politesse oblige, je salue monsieur le juge et sa greffière en leur souhaitant une bonne soirée, tout en sachant que la mienne sera loin d’être ‘bonne ».

De retour au corps de garde, je signe et reçois copie de mon audition et la signification du mandat d’arrêt.

À nouveau menotté, les deux policiers procèdent à mon transfert vers la prison de Dinant. Je peux apercevoir sur l’écran du tableau de bord qu’il est 14h39. Dehors, il fait nuageux et j’ai toujours aussi froid.

Durant tout le trajet, mon regard se perd sur le paysage qui défile à travers la vitre. J’aperçois plusieurs panneaux indiquant que nous prenions effectivement la direction de Dinant. J’y étais allé maximum 2 fois dans cette ville et je ne savais même pas qu’il y avait une prison.

Tout le trajet se fait en silence. Je n’ai prononcé aucun mot tout comme les deux policiers ou plutôt mes deux collègues qui semblaient troublés d’accompagner l’un des leurs en prison.

Arrivés sur place, nous faisons face à une grande enceinte, me faisant penser à l’entrée d’un vieux château. Le portail métallique s’ouvre et le véhicule de police se stationne dans une petite cour. À ce moment, j’aperçois les hauts murs de la prison où chaque fenêtre est sécurisée par de gros barreaux s’entrecroisant.

La pièce tombe enfin et réalise que je suis en taule, « UN FLIC EN TAULE »…

Dany Dumont